Inquiètude, par Léon Valade

Page créée le 20 novembre 2008 à 17h16 par François Direz print pdf

La petite main qui m'est chère,
La sauvage petite main
Qui pèse à mon bras si légère,
Y pèsera-t-elle demain ?

Quand un oiseau, léger comme elle,
Vient au bout des doigts se poser,
On sent encore frémir son aile
Défiante sous un baiser ;

Et, pour peu qu'on l'effarouche
D'un geste ce caprice ailé,
Il a fui, vous laissant la bouche
Tiède du plumage envolé.

Ainsi la douce main que presse
Tous les soirs celle de l'ami,
Même en lui rendant sa caresse
Ne s'abandonne qu'à demi...

Ainsi quelquefois il me semble,
Baisant cette main, mon trésor,
Sentir que sous mes lèvres tremble
Comme une aile prête à l'essor ;

Et malgré moi j'ai cette crainte
Que soudain, d'un geste inhumain,
Ne se dérobe à mon étreinte
Pour jamais la petite main !

Cahier de 1860

Dernière modification le 20 novembre 2008 à 17h16